Le Diable Volant

Les Archives de la flibuste

Un flibustier protestant, prisonnier au Mexique, demande à se convertir au catholicisme (1659)

For decades, Spanish Crown policy had dictated that all foreigners illegally in New Spain were to be sent to the island fortress of San Juan de Ulúa opposite the city of Veracruz, for deportation aboard the annual plate-fleets. Those convicted of felonious acts, such as piracy, were furthermore to serve as convict laborers until their departure. In the autumn of 1659, a large number of prisoners were being held as a result of captures made during the wars against the English on Jamaica and French on Hispaniola, soon to be suspended with the signing of peace treaties back in Europe. The island chaplain, the licentiate José de Escalante, wrote the following letter on 31 October 1659 to his Inquisitorial counterpart in Veracruz, the licentiate Bernabé de Aguilera, requesting clarification as to the reconciliation being sought by one such French captive. De Aguilera duly forwarded this document on November 6th to the Inquisitorial ministers in Mexico City, who received it four days afterward, yet apparently took no further action as the prisoners were soon to be deported to Spain.

David F. Marley.

Pendant des décennies, la politique de la couronne espagnole dictait que tout étranger qui se trouvait illégalement en Nouvelle-Espagne devait être envoyé à la forteresse de San Juan de Ulúa, en face de la ville de Veracruz, et ensuite déporté sur la flotte annuelle d'argent. Ceux qui avaient été trouvés coupables de crimes graves, par exemple la piraterie, devaient aussi travailler comme manoeuvres jusqu'à leur départ. À l'automne de 1659, la forteresse contenait de nombreux détenus faits prisonniers pendant les guerres contre les Anglais à la Jamaïque et contre les Français à Hispaniola. D'ailleurs ces guerres allaient bientôt être suspendues par suite de traités de paix signés en Europe. L'aumônier de l'île, le licenciado (diplômé) José de Escalante, écrivit la lettre ci-dessous le 31 octobre 1659 à son homologue de l'Inquisition à Veracruz, le licenciado Bernabé de Aguilera, pour demander des conseils concernant la réconciliation recherchée par un des prisonniers français. De Aguilera a dûment envoyé la lettre, le 6 novembre, aux ministres inquisitoriaux à Mexico, qui l'ont reçue quatre jours plus tard. Il paraît cependant qu'ils n'y ont pas donné suite puisque les prisonniers allaient bientôt, en tout cas, être déportés en Espagne.

David F. Marley.
traduit de l'anglais par Basil D. Kingstone.

description : lettre de José de Escalante (aumônier de San Juan de Ulúa) à Bernabé de Aguilera (commissaire du Saint Office à Veracruz), San Juan de Ulúa, 31 octobre 1659.
source : AGN (México) Inquisición/Vol. 458/Exp. 29/fol. 288.
contribution et transcription : David F. Marley (2005).
traduction française : Basil D. Kingstone (2005).

original espagnol

Señor mío: Entre otros prisioneros franceses que están en estas fuerzas, está uno que se llama Juan Ruan y me ha instado varias veces con lágrimas y al parecer con muchas veras, en que desea ser cristiano y restituirse al gremio de la Iglesia; y preguntándole para informarme de su estado, dice que nació de padres cristianos y que como a tal le criaron y educaron hasta edad de diez años, y que sabe seguramente es bautizado según orden de la Santa Iglesia Romana; que de dicha edad le pasaron de Francia a Holanda, en que ha vivido hasta el día de hoy, que pide por amor de Dios ser absuelto y restituido a la ley de Cristo nuestro Señor. Este francés está aquí prisionero y forzado por haberle apresado entre otros piratas; y por haber sido bautizado, deseo saber lo que en esto he de hacer y que Vuestra Merced como comisario del Santo Oficio, me dé la orden o la pida a los señores del Tribunal.

Guarde Dios a Vuestra Merced felices años. Isla, hoy octubre 31 de 1659 años.

Besa los manos de Vuestra Merced su capellán,

Don José de Escalante.

traduction française

Monseigneur, entre les prisonniers français qu'il y a dans cette prison, il y en a un qui s'appelle Jean Ruan [Rouen?] qui a insisté plusieurs fois, en pleurant et apparemment très sincèrement, qu'il veut être chrétien et rentrer dans le sein de l'Église. Et quand je lui ai demandé son histoire, il a dit qu'il est né de parents chrétiens qui l'ont élevé comme chrétien jusqu'à l'âge de dix ans, et qu'il sait de source certaine qu'il a été baptisé selon les rites de la Sainte Église catholique; qu'à cet âge-là, ils ont passé de France en Hollande, où il a vécu jusqu'à maintenant, et qu'il veut pour l'amour de Dieu être absous et restauré à la loi du Christ notre Seigneur. Ce Français est prisonnier et enfermé ici, ayant été pris avec d'autres pirates. Puisqu'il a été baptisé, je voudrais savoir ce qu'on peut faire dans ce cas et ce que vous m'ordonnez en tant que commissaire du Saint-Office, ou bien je vous demande de poser la question aux seigneurs du Tribunal. Que le bon Dieu vous donne des années heureuses.

Dans l'île, ce 31 octobre 1659.

J'ai l'honneur d'être, Monseigneur, votre aumônier,

Don José de Escalante.